Comment accompagner une personne qui demande l’aide médicale à mourir?
D’après les sondages, une portion importante de la population canadienne est favorable à l’euthanasie, appelée aide médicale à mourir. Pas étonnant donc que des catholiques en fassent la demande, même à l’encontre de la position de leur Église.
Dans ces cas, les intervenants spirituels et les bénévoles des institutions de santé sont directement interpellés : quelle attitude adopter?
Un accompagnement fidèle
Lorsqu’un médecin accepte de prendre soin d’une personne malade, il s’engage à l’accompagner tant que cela est nécessaire, habituellement jusqu’au terme de sa vie. Les deux s’entendent pour être partenaires d’une même aventure inédite : la personne malade accorde sa confiance, celle qui la soigne voit à en être digne.
Un partenariat similaire est souhaitable entre les personnes malades et celles qui offrent des soins spirituels. Celles-ci s’engagent à les accompagner jusqu’à la fin, même si elles demandent l’aide médicale à mourir. Il en va de la vérité de l’accompagnement et de l’authenticité de la relation humaine.
Un défi exigeant
Les institutions de santé doivent favoriser cet accompagnement et même le faire désirer. Si elle l’accepte, la personne malade en devient le maître d’œuvre, elle en détermine les modalités.
Idéalement, cette personne devrait pouvoir choisir celle qui va l’accompagner. Il faut en effet une forte dose de confiance pour permettre à quelqu’un de pénétrer dans son intimité.
Accompagner la personne malade signifie marcher avec elle, mais en demeurant sur sa route. Il faut résister à l’idée de l’amener sur sa route à soi, même si elle paraît préférable. Elle seule peut déterminer sa façon de mourir.
Face à une demande d’euthanasie
La personne soignante et celle qui intervient en soins spirituels peuvent être défavorables à l’aide médicale à mourir. Elles auront toutefois la sagesse de ne pas s’opposer directement à une demande.
Elles se placeront plutôt en mode d’écoute. D’abord pour bien comprendre le sens de cette requête. Est-ce un appel à l’aide? La crainte de la douleur physique? Le souci d’être un fardeau pour les siens? La détresse devant la dégradation de son corps? La volonté de contrôler sa fin de vie?
À mesure que ces motifs se dévoilent, il est possible d’apporter des clarifications, de relativiser des peurs, de peser ensemble le pour et le contre d’une solution sans retour comme celle de l’euthanasie.
L’expérience révèle que, le plus souvent, la souffrance est psychique ou morale. Or, celle-ci peut ouvrir un horizon sur la dimension spirituelle. Une approche de cette nature permet souvent de dégager un sens, voire de trouver une solution de rechange au désir de mort.
Une demande persistante
Si la personne malade persiste dans sa demande, il convient de respecter son choix, ce qui équivaut à respecter la personne elle-même et sa conscience.
Reste aussi à inventer un mode d’accompagnement respectueux de la conscience des intervenants ou intervenantes défavorables à l’euthanasie. Par exemple, convient-il d’être présent au moment des injections par le médecin? Je n’en suis pas certain. À cause de la charge symbolique de ces moments, une présence risque fort d’être perçue comme une approbation personnelle.
Tout accompagnement est unique et invite au respect du mystère de chaque personne. En fin de vie, il faut, plus que jamais, « enlever ses sandales » (cf. Exode 3,5).
Mgr Bertrand Blanchet
Texte paru dans Prions en Église, 20 janvier 2019, sous le titre de « Aide médicale à mourir et soins spirituels »