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Gens des premières nations : Laurette Grégoire

Laurette Grégoire en entrevue à Radio-Canada-Côte-Nord le 10 octobre 2019 alors qu’elle était présidente d’honneur du Colloque sur l'éducation « Uashikuekaikan -Tracer le chemin ». Photo: Radio-Canada/Lydianne Ouimet

C’est en 1951 que Laurette naît à Uashat, une communauté innue voisine de la ville de Sept-Iles fondée cette même année; elle est l’aînée de la famille.  Ses parents Clémentine Jourdain et John (Jean-Antoine) Grégoire auront sept autres enfants et adopteront le fils de la sœur de John après le décès de celle-ci.  Son père est un Naskapi de Fort Chimo (Kuujjuaq) qui avait accepté d’être adopté à 16 ans par un Innu de Uashat à la condition de pouvoir revoir un jour ses proches.  En 1956, les Naskapis sont déplacés à Schefferville et la petite famille déménage là-bas pour quelques années. Son père continuera à travailler comme journalier pour la Compagnie Iron du Canada (IOC).

« Je suis rentrée à la petite école là-haut, raconte Laurette. Quand nous sommes redescendus, comme il n’y avait pas d’école à Uashat, j’ai fréquenté le pensionnat de Malioténam tout en demeurant à la maison; je voyageais en autobus matin et soir. »  En troisième année, ses parents l’ont inscrite, comme d’autres enfants innus, à l’école Marie-Immaculée à Sept-Iles plus près de chez elle : « L’enseignement se donnait bien sûr en français et notre connaissance de cette langue n’était pas très élaborée. Nous avions beaucoup de difficulté à suivre les cours. Malheureusement, la grande majorité des enfants innus qui étaient avec moi n’ont pas réussi à poursuivre leurs études.» 

Laurette a complété son secondaire et souhaitait devenir infirmière. Une proposition l’a fait changer d’avis : « Une de mes tantes qui était enseignante m’a invitée à la remplacer dans sa classe de maternelle et je ne suis jamais sortie des écoles! » explique-t-elle.  Après avoir obtenu son baccalauréat, elle a commencé à enseigner en 1972.  Elle sera professeur au primaire et au secondaire dans les écoles innues.  Elle enseigne encore aujourd’hui et aide de nouveaux professeurs non-autochtones à apprivoiser sa culture. Elle prendra sa retraite en juin 2020.

Durant un été où elle travaillait comme monitrice au terrain de jeux, Jacques Roy qui faisait de l’arpentage à Uashat l’a remarquée. Ils se sont fréquentés et se sont mariés en 1973 : « À l’époque, une innue qui mariait un non-autochtone perdait ses droits et ne pouvait plus demeurer dans la communauté.  Cette loi a changé en 1975, mais j’ai tout de même habité pendant une vingtaine d’années à Sept-Iles; je ne me sentais pas chez nous! » souligne-t-elle.

Le couple a eu cinq enfants, dont quatre ont été adoptés : « L’adoption est une valeur importante dans notre famille, indique Laurette. Mes parents n’ont jamais fait de différence entre leurs enfants biologiques et leur fils adoptif.  Chez les Innus, c’est important de prendre en charge les enfants qui en ont besoin. »

Église Kateri Tekakwita de la communauté chrétienne innue de Uashat construite en 1992. Photo : Alain Latulippe

Un jour, Laurette s’est dit : « C’est impossible que la vie, ce soit juste naître, aller à l’école, travailler et mourir.  Pour moi, ça n’avait pas de sens! »  À la télévision, elle a entendu deux jeunes : « Ils parlaient du Christ vivant aujourd’hui et je voulais vivre cette même rencontre. »  Quelque temps plus tard, elle participe à une soirée du Renouveau charismatique : « Je n’ai pas été attirée par cette forme de prière, mais j’ai été rejointe par la Parole de Dieu.  Je me suis profondément sentie aimée de Dieu et j’ai eu la certitude que jamais il ne m’abandonnerait. »

Intérieur de l’église Kateri Tekakwita de Uashat où s’implique Laurette Grégoire. On peut admirer la grande fresque du plafond peinte par Ernest Dominique et une équipe.

Elle conclut : « Je suis inspirée par l’exemple de ma mère, ma grand-mère, mon arrière-grand-mère; des croyantes qui se tenaient debout devant l’adversité. Malgré toutes les difficultés que nous rencontrons dans notre communauté, j’aime les gens avec qui je vis.  Je sais qu’ici c’est une terre sacrée et que les personnes sont sacrées pour Dieu. Je ne voudrais pas vivre ailleurs! » .

Christine Desbiens, responsable des communications au diocèse de Baie-Comeau

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